DPI : En quoi l’IA va changer l’approche des brevets

En 2007, Apple sort l’iPhone. Une révolution. Un dispositif qui change radicalement le paysage des communications mobiles. Ce lancement n’est alors pas seulement un jalon pour Apple, mais redéfinit un secteur tout entier. Les brevets associés à l’iPhone, tels que le brevet américain N° 7.479.949 portant sur l’interface utilisateur multi-touch, ont été des composantes clés de cette transformation. Ces brevets sont disponibles dans des bases de données comme celle de l’USPTO, offrant des informations précieuses sur les technologies sous-jacentes.

DPI : En quoi l’IA va changer l’approche des brevets

En 2007, Apple sort l’iPhone. Une révolution. Un dispositif qui change radicalement le paysage des communications mobiles. Ce lancement n’est alors pas seulement un jalon pour Apple, mais redéfinit un secteur tout entier. Les brevets associés à l’iPhone, tels que le brevet américain N° 7.479.949 portant sur l’interface utilisateur multi-touch, ont été des composantes clés de cette transformation. Ces brevets sont disponibles dans des bases de données comme celle de l’USPTO, offrant des informations précieuses sur les technologies sous-jacentes.

Cependant, la vraie portée de l’innovation de l’iPhone ne se limite pas aux informations contenues dans ces documents de brevet. Le produit a initié une multitude de changements dans les habitudes de consommation, les modèles économiques, et même dans les normes de conception de l’industrie, qui ne sont pas tous capturés dans les brevets. Cela soulève une question importante : les bases de données de brevets, malgré leur richesse d’informations, sont-elles suffisantes pour comprendre pleinement les répercussions d’une telle innovation ? L’iPhone est un exemple qui illustre la nécessité d’aller au-delà des brevets pour saisir l’impact complet d’une innovation sur le marché et la société.

Les brevets ne donnent pas une vision complète de l’innovation

Lorsqu’on se demande si les bases de brevets sont suffisantes, on s’attaque à une problématique centrale dans le domaine de la propriété industrielle. En bref, non, elles ne sont pas suffisantes pour comprendre le paysage des innovations passées et présentes, en raison de plusieurs facteurs clés.

  • Évolution technologique rapide : L’évolution rapide des technologies et des industries signifie que les bases de brevets peuvent être rapidement dépassées, ne reflétant pas les toutes dernières innovations ou tendances émergentes.
  • Complexité croissante des innovations : Les innovations d’aujourd’hui sont souvent interdisciplinaires et complexes, rendant difficile la capture complète de leur essence uniquement par des brevets.
  • Informations non brevetées : Beaucoup d’innovations stratégiques ne sont pas brevetées pour des raisons de secret commercial ou d’autres stratégies de propriété intellectuelle, ce qui signifie que les bases de brevets ne fournissent pas une vue complète du paysage de l’innovation.
  • Globalisation et diversité des sources : Avec la globalisation, les informations pertinentes peuvent provenir de multiples sources et juridictions, rendant les bases de brevets trop limitées si elles ne sont pas complétées par d’autres types de données.

 

Évolution technologique et limites des bases de brevets

La technologie évolue à un rythme vertigineux, et les bases de brevets ne parviennent pas toujours à suivre cette cadence. Prenons l’exemple de l’intelligence artificielle (IA), un domaine où les innovations surviennent plus rapidement que le processus de brevetage ne peut les enregistrer. En 2016, DeepMind, filiale de Google, a fait une percée majeure avec AlphaGo, un programme d’IA capable de battre un champion du monde de Go. Bien que les techniques sous-jacentes à AlphaGo, comme les réseaux de neurones et l’apprentissage profond, soient en partie brevetables, la rapidité de l’évolution de l’IA signifie que de nombreuses avancées ne sont pas immédiatement brevetées, voire jamais.

Selon l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle (OMPI), les demandes de brevets ont augmenté légèrement en 2022 pour atteindre 278 100, le nombre le plus élevé jamais enregistré en une seule année. Cette statistique met en évidence l’ampleur de l’activité de dépôt de brevets, mais elle ne reflète pas entièrement le volume total des innovations. De nombreuses avancées technologiques importantes, en particulier dans des domaines en évolution rapide comme l’IA, ne sont pas capturées dans ces demandes, soit parce qu’elles sont gardées secrètes, soit parce que le processus de brevetage ne peut pas suivre le rythme de l’innovation.

Cet écart entre l’évolution technologique et la documentation des brevets soulève des défis pour les entreprises qui se fient exclusivement à ces bases pour guider leurs stratégies d’innovation et de propriété intellectuelle.

 

La complexité des innovations modernes

Les innovations d’aujourd’hui sont caractérisées par leur complexité et leur nature interdisciplinaire, ce qui les rend difficiles à encapsuler entièrement dans un seul brevet. Considérons le développement des véhicules électriques (VE). Un VE, comme ceux produits par Tesla, ne repose pas uniquement sur une seule invention ou brevet, mais plutôt sur une constellation de technologies couvrant des domaines allant de la batterie au système de gestion de l’énergie, en passant par les logiciels d’assistance à la conduite.

Cette complexité pose un défi pour les bases de brevets. Un brevet typique est conçu pour protéger une innovation spécifique ou un ensemble d’innovations étroitement liées. Cependant, dans le cas des VE, une vue d’ensemble complète nécessiterait une analyse de multiples brevets, souvent déposés par diverses entreprises et couvrant plusieurs domaines technologiques. Cette fragmentation rend difficile l’obtention d’une image claire et complète de l’état de l’art dans des domaines aussi complexes.

De plus, la manière dont ces technologies s’entrelacent et évoluent peut ne pas être évidente dans les bases de données de brevets. Les progrès dans les matériaux de batterie influencent directement la performance et l’efficacité des VE, mais les liens entre ces avancées et les améliorations spécifiques du véhicule peuvent ne pas être immédiatement apparents dans les documents de brevet.

Cette situation souligne un besoin crucial pour les professionnels de la propriété industrielle : aller au-delà des brevets pour comprendre les innovations, en intégrant des analyses de marché, des publications scientifiques et des rapports d’industrie.

 

Au-delà des brevets : informations stratégiques et secret commercial

Dans le monde industriel d’aujourd’hui, de nombreuses innovations clés ne sont pas brevetées, mais plutôt protégées comme secrets commerciaux. Exemple célèbre : la formule de Coca-Cola. Il s’agit de l’un des secrets commerciaux les mieux gardés. Bien que techniquement brevetable, l’entreprise a choisi de ne jamais breveter la formule, optant pour le maintenir comme un secret commercial. Cette stratégie a permis à Coca-Cola de protéger sa recette bien au-delà des 20 ans qu’aurait offerts un brevet.

Dans le secteur technologique, les algorithmes utilisés par les géants du numérique comme Google ou Facebook pour leurs moteurs de recherche et flux de nouvelles sont d’autres exemples de précieuses innovations non brevetées. Le brevetage pourrait exiger la divulgation de détails techniques que ces entreprises préfèrent garder confidentiels. De plus, la rapidité avec laquelle ces algorithmes évoluent rendrait de toute façon un brevet rapidement obsolète.

Cette réalité souligne une lacune dans les bases de données de brevets : elles ne capturent pas les informations stratégiques essentielles qui sont souvent cachées en tant que secrets commerciaux. Pour les entreprises, cela signifie que la surveillance des brevets seuls ne suffit pas pour une compréhension complète du paysage concurrentiel. Une analyse plus approfondie, intégrant des études de marché, des analyses de tendances et des évaluations de la concurrence, devient essentielle pour rester compétitif.

 

Vers une approche holistique : intégration de diverses sources d’information

Dans le contexte actuel, il est prioritaire pour les entreprises de compléter les informations issues des bases de brevets avec d’autres sources. Un bon exemple est l’utilisation des analyses de marché et des rapports sectorielspour comprendre les tendances émergentes. Dans le domaine de l’énergie renouvelable, les rapports de marché peuvent fournir des insights sur les avancées technologiques, les initiatives de réglementation, et les mouvements des concurrents, qui ne sont pas toujours immédiatement visibles dans les brevets.

Un autre outil important est la veille technologique, qui implique le suivi des publications scientifiques, des conférences, et des forums industriels. Les avancées dans des domaines spécifiques tels que les nanotechnologies et les matériaux avancés illustrent bien cette tendance : elles sont souvent explorées et discutées au sein d’articles de recherche et de conférences bien avant de se matérialiser dans le dépôt de brevets. Cette veille permet aux entreprises de rester à la pointe de l’innovation et d’anticiper les changements dans leur domaine.

De plus, les réseaux sociaux professionnels comme LinkedIn et les plateformes de collaboration comme GitHub offrent des informations précieuses sur les tendances actuelles, les expertises et les collaborations en cours dans divers domaines techniques. Ainsi, suivre les leaders d’opinion et les innovateurs dans le domaine de l’intelligence artificielle sur ces plateformes peut révéler des orientations et des collaborations nouvelles qui ne sont pas encore formalisées par des brevets.

Cette approche holistique, combinant les bases de brevets avec des sources d’information diversifiées, permet aux entreprises de développer une compréhension plus riche et plus actuelle de l’environnement innovant dans lequel elles opèrent.

 

Extension des domaines de la veille

La manière dont nous comprenons et gérons la propriété industrielle doit se transformer. Les bases de données de brevets, bien qu’indispensables, ne sont plus suffisantes pour fournir une vision complète de l’écosystème innovant. À l’avenir, nous pouvons nous attendre à ce que l’intégration des analyses de données, de l’intelligence artificielle et de l’apprentissage automatique dans la surveillance des brevets et des innovations ouvre de nouvelles voies pour saisir les tendances émergentes plus rapidement et plus efficacement.

En outre, la collaboration entre les différents acteurs de l’innovation, y compris les universités, les entreprises, et les instituts de recherche, deviendra probablement plus intégrée, créant un écosystème d’innovation plus dynamique et interconnecté. Les professionnels de la propriété industrielle devront donc élargir leurs compétences pour inclure la gestion de ces collaborations complexes et l’analyse de données diversifiées.

Enfin, face à l’accélération du cycle d’innovation, une approche plus agile et proactive de la propriété intellectuelle sera nécessaire. Cela implique non seulement de protéger les innovations, mais aussi de les utiliser stratégiquement pour stimuler la croissance et l’innovation continue. En embrassant ces changements et ces défis, les professionnels de la propriété industrielle joueront un rôle clé dans le façonnage du paysage de l’innovation de demain.


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